Monsieur le Président,
Au lendemain de la hausse des
prix du carburant et du gaz butane, votre porte-parole, descendu de l’olympe du Palais de la
république, auréolé de gloire médiatique et riche en généralités, annonçait
sans sourciller aux sénégalais que « tout ce que vous pouvez faire, c’est
retarder la hausse des prix », comme si vous n’étiez pas élu pour rendre
la vie au Sénégal moins méchante. Par cette phrase, synonyme d’aveu
d'impuissance, ce monsieur nous invite insidieusement à assimiler votre programme
de campagne à ces ravissantes femmes qu’on ne rencontre que dans les
contes ; elles sont surhumainement belles mais incomestibles. S’il avait
sorti une telle énormité de sa bouche pendant la campagne électorale qui a
précédé votre accession à la magistrature suprême, je suis persuadé qu’il serait
automatiquement interdit de parole. Cette phrase n’est pas banale parce qu’elle
sort de la bouche de votre porte-parole. En ce sens, elle a la force d’éteindre
la flamme déjà vacillante de l’espérance de millions de sénégalais que la
cherté de la vie a fini de transformer en épaves et par ricochet, réveiller le
volcan qui a brûlé le régime de Mame Wade.
Monsieur le Président, vos
concitoyens savent qu’il est prématuré de réclamer de vous un bilan après
seulement six mois de gestion mais ils ont mille et une raisons d’être
impatients. Chaque jour passé entre les mains des rebelles est un enfer pour
nos frères militaires kidnappés en Casamance, le soleil n’est pas de retour à
l’école sénégalaise, l’enseignement
coranique est traité en parent pauvre, l’électricité est aussi rare que
l’eau au Sahara, la recrudescence de la violence sauvage est plus
qu’inquiétante, le chômage des jeunes est un cancer social, les handicapés
attendent toujours la signature des décrets d’application de la loi
d’orientation sociale et votre porte
parole vous donne le droit d’entretenir l’illusion que des facteurs exogènes
sont à même de vous dédouaner. Il se
trompe lourdement.
Vous ne trouverez votre salut que
dans votre capacité à saisir là où les préoccupations du peuple se trouve, à concevoir,
avec la prise en compte toujours plus attentive de la parole de chaque sénégalais,
les meilleures solutions et confier leur traduction en actes à un gouvernement
efficace qui travaille avec l’ensemble des forces vives de la nation, le tout
dans la meilleure transparence possible. Hélas, nombre de vos ministres sont
statiques et pensent qu’ils ont été nommés seulement pour nous expliquer les
causes de nos souffrances comme si nous ne les connaissions pas.
Pour bouger avec ce monde sans
pitié et qui va si vite, il nous faut des décideurs décidés, percutants, précis
et qui pédalent vite. Ce n’est pas en tentant de toujours justifier vos initiatives
qu’elles qu’elles soient, en produisant chaque jour de nouveaux slogans et en
polémiquant inutilement avec les tenants de l’ancien régime que vos ministres
permettront au Sénégal de gravir les montagnes et traverser les marécages qui le
mènent à l’émergence. La foire aux slogans et les reniements n’ont pas de
places dans la forme de gouvernance nouvelle que les sénégalais appellent de
tous leurs vœux. Les défis sont nombreux et complexes mais on a l’impression
que vous tardez à prendre vos marques.
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